Les bactéries du genre Agrobacterium, et en particulier A. tumefaciens, ont la capacité de transférer une partie de leur ADN (appelé ADN-T) dans le noyau des cellules végétales (1). L'agro-infiltration vise à utiliser cette bactérie comme vecteur de transfert de matériel génétique étranger dans des plantes ou des cellules végétales, de sorte qu'elles puissent être utilisées comme matrices pour le mécanisme de transcription/traduction de la cellule sans nécessiter de réplication ni d'intégration (2).
Pour effectuer une agro-infiltration, les tissus végétaux sont infiltrés (in vivo ou ex vivo) avec une suspension liquide d'Agrobacterium sp. contenant une construction génétique afin de promouvoir l’expression localisée d’un matériel génétique donné. En pratique, cette technique est utilisée dans un objectif de production de protéines ou de molécules d’intérêt (3, 4). Celles-ci sont le plus souvent purifiées après récolte et broyage des tissus de la plante. Les avantages de l'agro-infiltration par rapport à une transformation stable sont la rapidité, la commodité ainsi qu’un niveau d'expression élevé.
Dans certaines applications in vivo, l’ADN-T peut contenir du matériel de réplication (soit sous forme de génome de virus entièrement fonctionnel, soit sous forme de « réplicons » ne pouvant pas se propager dans la plante) afin d'obtenir l'expression dans des parties de la plante autres que la zone infiltrée ou pour augmenter encore le niveau d'expression.
L’agro-infiltration « sensu stricto » s’applique très localement sur une plante. En règle générale, le matériel génétique n'est pas incorporé de manière stable dans la lignée germinale et n'est donc pas transmis à la descendance.
Les fleurs ou inflorescences contenant des cellules germinales sont agro-infiltrées (« floral dip ») afin d'obtenir une transformation stable de certains embryons pouvant être sélectionnés à l'étape de germination. De nos jours, c'est la technique de choix pour transformer la plante modèle Arabidopsis thaliana (5). Cette technique peut également être utilisée pour infecter d'autres espèces de la même famille (notamment le colza, le chou, la moutarde, etc.).
La bactérie A. tumefaciens peut également infecter des plantes de façon naturelle comme par exemple la patate douce (6).
Références
- Grimsley N, Hohn B, Hohn T, & Walden R (1986) "Agroinfection," an alternative route for viral infection of plants by using the Ti plasmid. Proc Natl Acad Sci U S A 83(10):3282-3286.
- Chen Q, et al. (2013) Agroinfiltration as an Effective and Scalable Strategy of Gene Delivery for Production of Pharmaceutical Proteins. Adv Tech Biol Med 1(1).
- Fischer R, Schillberg S, Hellwig S, Twyman RM, & Drossard J (2012) GMP issues for recombinant plant-derived pharmaceutical proteins. Biotechnol Adv 30(2):434-439.
- Leuzinger K, et al. (2013) Efficient agroinfiltration of plants for high-level transient expression of recombinant proteins. J Vis Exp (77).
- Clough SJ & Bent AF (1998) Floral dip: a simplified method for Agrobacterium -mediated transformation of Arabidopsis thaliana. 16(6):735-743.
- Kyndt T, et al. (2015) The genome of cultivated sweet potato contains Agrobacterium T-DNAs with expressed genes: An example of a naturally transgenic food crop. Proc Natl Acad Sci U S A 112(18):5844-5849.