Des OGM non autorisés au Luxembourg : une revue

Depuis le début des cultures commerciales à grande échelle de plantes génétiquement modifiées (GM) en 1996, on craint que les cultures conventionnelles ne soient contaminées par des plantes GM. L'hybridation spontanée entre une culture transgénique et un parent sauvage pourrait entraîner un nouveau problème phytosanitaire en propageant le caractère GM dans les populations sauvages ainsi que les mauvaises herbes. Dans les pays où des OGM sont cultivés à grande échelle, il est déjà devenu pratiquement impossible de trouver des cultures qui ne contiennent pas de matériel GM.

La présence d'OGM non autorisés en UE, c'est-à-dire ceux sans autorisation de culture ou de commercialisation dans les denrées alimentaires, les aliments pour animaux ou les semences, constitue un motif de rappel de produits ou de rejets des importations aux frontières nationales.

En UE, l'étiquetage des ingrédients GM est obligatoire au-dessus du seuil de 0.9 % dans les denrées alimentaires. Le dépassement de ce seuil est donc également un motif de rejet des importations ou de retrait du produit. Par contre, l'étiquetage n'est pas requis pour les produits non alimentaires génétiquement modifiés (par exemple, les biocarburants ou les matériaux tels que le coton).

L'UE applique l'une des normes de sécurité les plus strictes au monde garantissant ainsi la sécurité des aliments pour les consommateurs. Un outil important constitue le système d'alerte rapide pour les denrées alimentaires et les aliments pour animaux.

Créé en 1979, ce système permet d’échanger des informations entre les Etats-Membres de l‘UE, la Commission, l’EFSA, la Norvège, le Liechtenstein, l’Islande et la Suisse. Fonctionnant 24 heures sur 24, des notifications sont envoyées, reçues et traitées collectivement et efficacement. Grâce au système RASFF, de nombreux problèmes de sécurité alimentaire ont été évités avant qu'ils ne deviennent nocifs pour les consommateurs européens (1).

Malgré ce système performant, il n’est pas exclu que des OGM non autorisées se retrouvent sur le marché luxembourgeois.

Riz

Bien qu'il n'y ait aucune culture commerciale de riz GM dans le monde, deux cas distincts de contamination de riz GM non autorisé, à savoir LLRICE des États-Unis et le riz "BT63" de Chine ont touché le Luxembourg.

Riz en provenance de Chine

Le riz "Bt 63", en provenance de Chine, présente une résistance à certains insectes en exprimant la protéine Cry1Ac de Bacillus thuringiensis et n'est pas approuvé pour l'alimentation humaine ou animale dans le monde. Le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne ont découvert en septembre 2006 la présence de ce riz non autorisé dans certains aliments. Les pays ont par la suite notifié le système d'alerte rapide RASFF. La Chine, à son tour, a également retracé les produits et a suspendu leurs exportations. Malgré ces efforts, du riz Bt 63 non autorisé a continué à faire surface.

En 2008, la Commission européenne avait décidé d'exiger une certification obligatoire pour les importations de produits de riz chinois qui pourraient contenir l'OGM non autorisé "Bt63". Malgré les mesures annoncées par les autorités chinoises en 2007, des alertes concernant la présence de ce riz GM ont été signalées jusqu'à la fin de 2007. Les mesures d'urgence adoptées par la Commission prévoient que les envois soient certifiés comme ne contenant pas de riz GM et que les importations soient soumises à un échantillonnage et à des contrôles de documents aux points d'entrée dans l'UE. Des mesures supplémentaires étaient imposées trois ans plus tard en 2011 et sont toujours en vigueur aujourd’hui (2).

En 2011, le Luxembourg avait également été touché par des produits contaminés en provenance de la France via la Belgique. Les produits en question ont été retiré de la vente.

Riz en provenance des Etats-Unis

La variété de riz GM américaine LL601 avait échappé aux essais en champs aux USA entre 1998 - 2001 et avait par la suite contaminé les approvisionnements alimentaires mondiaux sans détection jusqu'en janvier 2006. Elle a depuis été découverte dans 24 pays dont 15 en Europe.

Ce riz, tolérant au glufosinate d’ammonium, a par la suite de cette annonce, été autorisé aux États-Unis (3). Cependant, il est interdit de culture et de commercialisation en EU. En 2006, il a également été détecté au Luxembourg.

Papaye

Un institut de de recherche thaïlandais avait mis au point des papayes GM résistantes au PRSV (virus des taches en anneaux du papayer), et conduit des essais sur le terrain. Des analyses ont révélés que des semences vendues contenaient des graines de papaye GM (4). Par la suite de nombreux agriculteurs avaient cultivé par inadvertance de la papaye GM en 2004. Le gouvernement avait ordonné la destruction de tous papayers GM, y compris ceux des essais en champs. En 2005, la papaye GM a été trouvée dans plusieurs régions de Thaïlande et par conséquent dans les exportations conduisant à 11 alertes RASFF dans l'UE depuis 2007, avec 4 incidents enregistrés en 2012 et 12 en 2013.

En 2013 une papaye verte en provenance de Thaïlande a été testée positive et retirée du marché luxembourgeois.

Lin

La graine de lin GM (FP967), appelée "Triffid" résistante à des herbicides, a été mise au point par un institut de recherche public du Canada et a été approuvée pour la culture et comme aliment au Canada en 1996. À la fin des années 1990, son utilisation commerciale était également autorisée aux États-Unis. Cependant, la graine Triffid n'a jamais été vendue pour la production commerciale. Par considération pour les marchés d'exportation, les agriculteurs se sont abstenus de la cultiver et en 2001, l'agrément a été retiré (3, 5). L’origine de la contamination GM dans les produits à base de lin est vraisemblablement due à des semences contaminées.

Les graines de lin canadiennes ont été exclues de leur plus grand marché après que des traces de Triffid ont été trouvées dans les exportations. L'Union européenne, qui achète 70% du lin canadien, a une politique de tolérance zéro à l'égard des organismes génétiquement modifiés non autorisés et refuse les lots contaminés. Une ruée à l'échelle de l'industrie a eu lieu pour éliminer les semences incriminées depuis que le problème a été découvert.

Dans les années 2009 – 2010 le Luxembourg a initié 7 alertes suite à la détection du lin Triffid sur le territoire luxembourgeois. Depuis, les niveaux de contamination par du lin GM en UE ont chuté au cours des années.

Maïs

Le maïs 3272 a été développé pour exprimer une alpha-amylase thermostable afin d'optimiser la production d'éthanol, pour l’importation, la transformation ainsi que l’utilisation en alimentation humaine et animale. Cependant, les informations fournies pour l’évaluation comparative ne répondaient pas aux critères des lignes directrices de l’EFSA pour l’évaluation des risques liés aux plantes OGM (6).

Un manque de données signifiait également que l’EFSA n'était pas en mesure de conclure pleinement sur l'allergénicité de l’alpha-amylase nouvellement exprimée. Aucune autorisation de mise sur le marché n’a par conséquent été octroyée.

En 2018, des traces de ce maïs ont été détecté dans une farine de maïs vendue au Luxembourg. En appliquant la politique de la tolérance 0 aux produits GM non autorisées en UE, le produit en question a été retiré de la vente.

Références
  1. Commission Européenne, RASFF - Food and Feed Safety Alerts https://ec.europa.eu/food/safety/rasff_en, accessed: 2021.
  2. Commission Européenne 2011 Décision d'exécution (UE) 2011/884 de la Commission du 22 décembre 2011 sur des mesures d’urgence concernant la présence non autorisée de riz génétiquement modifié dans les produits à base de riz provenant de Chine et abrogeant la décision 2008/289/CE.
  3. Price B & Cotter J (2014) The GM Contamination Register: a review of recorded contamination incidents associated with genetically modified organisms (GMOs), 1997–2013. J International Journal of Food Contamination 1(1):5.
  4. Davidson SN (2008) Forbidden fruit: transgenic papaya in Thailand. Plant Physiol 147(2):487-493.
  5. Ellstrand NC (2012) Over a Decade of Crop Transgenes out-of-Place. In: Wozniak C., McHughen A. (eds) Regulation of Agricultural Biotechnology: The United States and Canada. (Springer, Dordrecht.).
  6. EFSA Panel on Genetically Modified Organisms, et al. (2013) Scientific Opinion on application (EFSA-GMO-UK-2006-34) for the placing on the market of genetically modified maize 3272 with a thermotolerant alpha-amylase, for food and feed uses, import and processing under Regulation (EC) No 1829/2003 from Syngenta Cr. EFSA Journal 11(6).

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