Détection des produits obtenus par mutagénèse et cisgénèse ciblées

La procédure d'autorisation de mise sur le marché des OGM conventionnels (obtenus par transgénèse) exige la description d'une ou plusieurs méthodes de détection spécifiques de l'événement de transformation (1, 2). Cependant, cette disposition de la législation communautaire relative aux OGM soulève plusieurs difficultés d’application aux produits obtenus par mutagenèse et cisgénèse ciblées. En fonction de la taille de la modification et de la séquence nucléotidique de la région environnante, il n'est pas toujours possible de concevoir une méthode robuste et quantitative ciblant la modification. Le principal défi consiste toutefois à démontrer la spécificité de la méthode par rapport à l'événement de transformation, ce qui fait partie des exigences minimales de performance pour les méthodes d'analyse établies par le réseau européen de laboratoires de référence pour les OGM (ENGL) (3).

L’ENGL a examiné les implications des exigences analytiques lorsqu'elles sont appliquées aux produits végétaux obtenues à l'aide de nouvelles techniques génomiques (4-6). Ces rapports aboutissent à la conclusion que les essais analytiques visant à assurer la traçabilité ne sont pas considérés comme réalisable pour tous les produits obtenus par les nouvelles techniques d’édition génétiques, à la fois en raison de restrictions techniques et de problèmes de mise en œuvre.

Les génomes végétaux sont connus pour être très variables et sujets à des mutations naturelles du même type que celles qui peuvent être induites par la mutagénèse ciblée ou la cisgénèse. Les produits dérivés de la mutagenèse ciblée ou de la cisgénèse pourraient en principe provenir de la sélection conventionnelle, ce qui les rend difficiles à distinguer.

Les produits végétaux obtenus par mutagénèse ciblée ou cisgénèse et pour lesquels on ne dispose pas d'informations détaillées sur les modifications de la séquence seront difficiles à détecter par les techniques analytiques. Les contrôles du marché effectués par les autorités compétentes seront donc moins efficaces que pour les OGM conventionnels. Les méthodes de dépistage qui sont couramment utilisées pour détecter les éléments génétiques communs connus présents dans la plupart des OGM conventionnels ne peuvent pas être appliquées ou développées pour ces produits végétaux. On s'attend également à ce que ces produits contiennent de multiples modifications susceptibles d'être séparées dans les générations suivantes, et chacune d'entre elles nécessitera une méthode de détection distincte pour être validée et appliquée à des fins de contrôle.

D'autres technologies, telles que le séquençage de nouvelle génération (NGS) (7), sont capables de détecter des changements de la séquence génomique, mais les résultats ne sont généralement pas quantitatifs et l'analyse de denrées alimentaires ou d'aliments pour animaux par NGS est difficile.

En raison de la variabilité inhérente aux génomes végétaux, il peut être difficile d'identifier les mutations génomiques résultant de la mutagenèse ciblée, même si des méthodes plus coûteuses et laborieuses basées sur le séquençage sont intégrées dans le flux de travail des laboratoires de contrôle. Une mutation simple ou une délétion, une substitution ou une insertion plus importante peut être détectée par l'analyse de la séquence, mais cela ne confirme pas nécessairement qu'elle a été générée par la mutagenèse ciblée ou la cisgénèse.

En conclusion, les produits qui ont des séquences d'ADN identiques mais qui ont été développés soit naturellement, soit par sélection conventionnelle, soit en utilisant de nouvelles techniques génomiques, ne peuvent pas être distingués par des méthodes analytiques. Pour un contrôle efficace dans le commerce de ces produits, et en particulier des produits inconnus entrant dans l'Union européenne, la détection analytique devra être complétée par d'autres outils notamment par la documentation.

Références

1.  Parlement Européen et le Conseil de l'Union Européenne (2003) Règlement (CE) N° 1829/2003 du Parlement Européen et du Conseil du 22 septembre 2003 concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés.

2.  Parlement Européen et le Conseil de l'Union Européenne (2001) Directive 2001/18/CE du Parlement Européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil.

3.  European Network of GMO Laboratories (ENGL), Definition of Minimum Performance Requirements for Analytical Methods of GMO Testing, JRC95544, 2015.

4.  H. Emons et al., Challenges for the detection of genetically modified food or feed originating from genome editing, EUR 29391 EN,, 2018.

5.  European Network of GMO Laboratories (ENGL), Detection of food and feed plant products obtained by new mutagenesis techniques, (JRC116289), 2019.

6.  European Network of GMO Laboratories (ENGL), Detection of food and feed plant products obtained by targeted mutagenesis and cisgenesis, JRC133689, 2023.

7.  J. Shendure, H. Ji, Next-generation DNA sequencing. Nat Biotechnol 26, 1135-1145 (2008).

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